Livret professionnel : ne pas subordonner sa délivrance à la possession de l’intégralité du capital point sur le permis de conduire
Le Haut Commissariat a eu matière à connaitre de différents refus de délivrance de livret professionnel pour des chauffeurs de taxis, fondés explicitement sur la circonstance que les demandeurs ne disposaient pas de la totalité des points sur leur permis de conduire. Lecture faite du chiffre 6 de l’article 1erde l’Arrêté Ministériel n° 2008-451 du 8 août 2008 relatif aux conditions et aux modalités de délivrance et de renouvellement du livret professionnel, il est apparu que cette pratique relevait d’une mauvaise interprétation de cette disposition par les Service de l’Etat.
Il faut relever que si l’Arrêté Ministériel précité prévoit bien que les titulaires d’un permis de conduire étranger doivent produire, en sus de la copie du permis en cours de validité, un «relevé de points intégral» - ce visa renvoyant en pratique au « Relevé d’Information Intégral » (RII) délivré par les préfectures en France - la fourniture de ce document a pour seul objet de justifier que les droits à conduire du titulaire ne sont « ni suspendus, ni annulés», une attestation du pays de délivrance du permis de conduire pouvant d’ailleurs alternativement être produite à cette fin.
Dans les pays européens pratiquant le permis à points en effet, le retrait de points est une sanction complémentaire aux amendes pour infraction au Code de la route qui demeure sans effet immédiat sur les droits à conduire, seule la perte de la totalité des points entraînant une invalidation du permis de conduire et partant l’obligation de le repasser. C’est donc sur la seule présence de points restants sur le permis à points (gage de sa validité administrative) ainsi que sur l’absence de toute suspension ou annulation administrative ou judiciaire du permis - et non sur la possession de l’intégralité du capital points prévu au permis étranger - que doivent en toute logique porter les vérifications prescrites à l’article premier de l’Arrêté Ministériel n° 2008-451, du point de vue de la validité des droits à conduire.
S’agissant en effet d’apprécier plus globalement le comportement routier d’un candidat au livret professionnel et son observance du Code de la route, cette appréciation ne saurait se faire sur des critères distincts en fonction des personnes, en exigeant des titulaires d’un permis de conduire étranger de remplir une condition à laquelle les résidents monégasques ne sont pour leur part pas assujettis - la Principauté n’ayant pas quant à elle adopté le permis à points - une telle exigence ne pouvant par définition qu’être inéquitable et discriminatoire.
C’est pourquoi il semblait nécessaire au Haut Commissariat que cette appréciation s’appuie sur des « garanties » équivalentes requises de tous les candidats et appréciées tant en fonction de leur parcours de conducteur que sous l’angle de la moralité (visée à l’article 2, chiffre 6°, de l’Arrêté Ministériel précité), les refus devant au surplus être motivés de façon suffisante en droit et en fait au regard des dispositions de la Loi n° 1.312 du 29 juin 2006 - ce qui ne parait pas être le cas des refus de délivrance du livret professionnel notifiés par le passé au seul motif de la non-possession des 12 points.
Compte tenu au demeurant du système en vigueur de récupération automatique de points au bout d’un certain laps de temps sans nouvelle infraction et du « rachat » possible de points par le biais du suivi d’un stage, le solde de points figurant sur le Relevé d’Information Intégral ne donne en lui-même qu’une photographie à un instant T de la situation d’un automobiliste. Ce sont les autres informations apparaissant sur ce Relevé, et en particulier la mention et le détail de toutes les infractions commises au Code de la route, qui pourront quant à elles, en fonction de leur nature et de leur gravité, permettre d’apprécier de façon légitime et circonstanciée les comportements passés au volant du demandeur, le cas échéant incompatibles avec l’activité de chauffeur de taxi.
Le Haut Commissariat a ainsi considéré que la pratique actuelle consistant à refuser la délivrance du livret professionnel dès lors qu’un demandeur ne disposait pas de la totalité des points sur son permis à points n’étaient ni fondée en l’état des textes, ni susceptible de revêtir une réelle pertinence en pratique et a estimé utile d’inviter les autorités à l’abandonner pour l’avenir.
Suivi de recommandation
Reconnaissant qu’une erreur d’interprétation avait pu être commise par le passé dans le cadre de l’instruction des demandes d’obtention du livret professionnel, le Gouvernement a confirmé au Haut Commissariat que la Direction de la Sûreté Publique avait reçu pour instruction de motiver à l’avenir ses avis négatifs au visa des infractions commises, lorsqu’elles sont de nature à justifier un refus de délivrance du livret professionnel.