Chef de foyer : résoudre la situation des familles recomposées (mère CCSS / beau-père SPME) au plan de la protection sociale
Le Haut Commissariat a été saisi par des foyers recomposés, au sein desquels la femme était affiliée à la Caisse de Compensation des Services Sociaux (CCSS) et le nouveau mari au Service des Prestations Médicales de l'Etat (SPME), qui ne pouvaient plus faire prendre en charge au plan de la maladie et des prestations familiales, l’enfant vivant au foyer et issu d’une première union de la mère. Ce type de situations s’est présenté dans le prolongement de l’adoption de l’Ordonnance Souveraine n° 7.155 du 10 octobre 2018 relative à l’octroi des allocations pour charges de famille aux fonctionnaires et agents de l’État et de la Commune, laquelle a modifié à compter de janvier 2019 les conditions pour être considéré comme chef de foyer, en limitant notamment la dévolution de ce statut aux seuls père et mère d’un enfant.
S’il est à souligner que conformément aux nouvelles règles édictées, les enfants nés d’une précédente union de la mère ne passent plus automatiquement sous la couverture sociale du nouveau mari au détriment de celle de ses parents, ce qui est bien évidemment très positif et plus juste pour beaucoup de foyers, cela ne va pas sans poser de difficulté. En effet, dans la mesure où la règle relative à la dévolution de la qualité de chef de foyer n’a pas évolué en parallèle dans le régime des salariés - cette règle demeurant que lorsqu’une femme séparée ou divorcée se (re)marie, son nouveau conjoint devient chef de foyer (article 5 bis A, deuxième alinéa, b), de l’Ordonnance Souveraine n° 1.447 du 28 décembre 1956) - les mamans concernées ne peuvent pas ouvrir droit pour leur enfant auprès de la CCSS, où elles sont pourtant affiliées du fait de leur travail.
Ainsi, l’absence d’harmonisation et d’évolution coordonnée de ces deux réglementations conduisait dès lors à ce que ces couples se voient désormais refuser l’ouverture des droits pour les enfants vivant au foyer et nés d’une précédente union de la mère et soient renvoyés vers la CPAM et la CAF au motif de leur résidence sur le territoire français, alors même que les deux personnes qui en ont la charge effective à plein temps (la mère et le beau-père) cotisent toutes deux aux régimes sociaux monégasques.
Il faut au demeurant observer que ce cas de figure était susceptible de concerner également des foyers vivant à Monaco, lesquels n’avaient plus alors accès à aucune forme de protection sociale. Et si dans certains cas, les enfants concernés auraient pu en théorie malgré tout être couverts au titre de la maladie par la CPAM au travers du rattachement au père en France (quand bien même il n’en a pas la charge effective) dans l’hypothèse où celui-ci aurait été affilié à un régime français, cela ne pouvait quoi qu’il en soit pas toujours être le cas puisque le père des enfants peut – comme dans les cas d’espèce que nous avons eu à traiter - ou bien être lui-même affilié à un régime monégasque (sans ouvrir droit puisque n’ayant pas la charge effective de l’enfant), ou bien ne plus avoir de lien avec les enfants.
Ainsi a-t-il semblé nécessaire au Haut Commissariat, dans l’attente d’une réforme globale des régimes sociaux monégasques, qu’une solution soit trouvée pour ces foyers, permettant une prise en charge équitable des enfants concernés.
Si le Gouvernement avait un temps envisagé de faire évoluer l’Ordonnance Souveraine n° 1.447 précitée pour permette aux femmes affiliées CCSS, dans ce cas de figure, de pouvoir couvrir leurs enfants, le Haut Commissariat n’avait pas manqué de souligner les problèmes d’égalité de traitement que cette solution aurait posé, non seulement entre femmes mariées suivant leur situation familiale - en couple avec le père des enfants ou en couple avec un nouveau conjoint - mais également entre les enfants vivants au foyer - ceux nés d’un premier lit de la mère ayant vocation à dépendre de la couverture sociale de la maman quand ceux issus de la nouvelle union continueraient à être couverts par le papa.
Le Haut Commissariat avait quoi qu’il en soit recommandé que, dans l’attente de la réforme envisagée, une mesure dérogatoire soit prise pour maintenir les droits ouverts dans le régime SPME à ces foyers, tant au plan de la maladie que des allocations familiales, jusqu’à ce que les mères CCSS puissent elles-mêmes ouvrir droits pour leurs enfants.
Il avait également recommandé qu’un principe de subsidiarité soit réintroduit au sein de l’Ordonnance n° 1.447, par dérogation à la condition que seuls les père et mère peuvent être considérés comme chef de foyer, pour permettre, dans certaines situations spécifiques, que le nouveau conjoint ouvre droits pour ses beaux-enfants. En effet dans le cas de figure où le parent d’enfants vivant dans un foyer résident à Monaco fait le choix de rester père ou mère au foyer parce que la situation de son nouveau conjoint affilié SPME le lui permet, les enfants ne pouvaient plus alors être couverts à aucun titre (ni celui de l’activité professionnelle, ci celui de la résidence).
Suivi de recommandation
MAJ 30/09/2020
Sur ce dernier point, il faut se réjouir que le Haut Commissariat ait été entendu puisque la règlementation a rapidement été modifiée en ce sens. Pour les foyers beaux-pères SPME / mères CCSS, il faut relever que le Comité de contrôle des caisses sociales n’a finalement pas retenu la modification de l’Ordonnance souveraine n° 1.447 proposée par le Gouvernement, préférant continuer à œuvrer dans le sens d’une réforme plus globale de la réglementation en vigueur, induisant une élimination complète de la notion de chef de foyer, plutôt que de modifier à la marge le dispositif pour régler un problème tout en en créant de nouveaux. Pour autant une solution sociale et pragmatique a pu être trouvée pour ces foyers permettant de ne pas les laisser dans une situation de « non droit », au travers de l’accord donné à une prise en charge des enfants par la CCSS sur fonds social, à la fois au titre de la couverture maladie et des prestations familiales, l’Etat ayant pour sa part pris en charge rétroactivement le versement des prestations familiales sur la période transitoire entre la date de fermeture des droits dans le régime SPME et la date de prise en charge par la CCSS.